mardi 25 août 2009

Allah a donné. Allah a repris. Béni soit le nom d’Allah !


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Dans le malheur qui nous a frappés cette semaine, nous avons eu des témoignages d’amitié qui nous ont réconfortés et aidés à atténuer la peine. Que tous trouvent à travers ces quelques lignes notre profonde gratitude.
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« Et fais la bonne annonce aux endurants, qui disent, quand un malheur les atteint : « certes nous sommes à Allah, et c’est à lui que nous retournerons » Coran 2 :155, 156.
Bien cher ami,
Voilà partis les derniers visiteurs. Plaie vive, torrent de larmes, cœur dévasté dans la cruelle solitude. J’ai le temps de penser pour essayer de comprendre et encaisser le coup. Allah a donné, Allah a repris. Béni soit le nom d’Allah. On ne devrait pas avoir de projet du tout. On devrait juste agir, faire ce qu’on pense devoir faire et défaire les pièges de l’instantanéité qui nous confine à la procrastination. Depuis au moins cinq ans je prie pour que ce jour ne me trouve pas loin de toi (je le répétais à un ami il y a seulement deux semaines). Il me fallait venir vivre aux moins deux semaines à Kaédi pour percer auprès de toi certains mystères. Exemple : comment peut-on en milieu urbain tenir à vivre avec des animaux au point de ne plus avoir à répondre à ceux que cette compagnie improbable importunait que : « celui qui n’aime pas mes vaches je n’ai rien à lui dire » ou encore : « celui qui n’aime pas les animaux n’a tout simplement pas de cœur » ? Deux anecdotes me mettent sur une piste. Il me faut revenir au début de la décennie 80’. Un de tes veaux se faisait attaquer par un chacal qui lui arrachait un morceau de viande à vif (ainsi vivent les chacals). Alerté, tu rapatriais la victime à la maison, à l’Elevage. Toute la maisonnée fut mobilisée des jours durant au chevet de la pauvre victime. Un jour que tu lui administrais des soins, je t’entendis dire « fais ce que doit, advienne que pourra ». Du haut de mes huit ans, je t’en demandais la signification. Tu te contentas de m’expliquer le sens du proverbe, me laissant deviner que les jours du patient étaient désormais comptés. Allah a donné, Allah a repris. Béni soit le nom d’Allah.
La seconde anecdote vint quelques mois après. Un très joli bélier blanc que tu élevais à la maison et que tu appelais affectueusement par le nom d’un homme politique mauritanien pour qui tu avais le plus grand respect, vint à faire un violent malaise qui nous traumatisa tous. Tu mis toute la bonne volonté que nous te connaissions à le sauver. Au bout de quelques longues minutes je t’entendis, la voix enrouée et les yeux embués, demander à mon jeune frère d’aller appeler quelqu’un. Toi le vétérinaire, appeler au secours au sujet d’un mouton agonisant ? La chose devait être bien mal engagée pour le pauvre bélier ! Tu prenais un couteau et tournais autour. Tu n’eus jamais le courage de lui trancher la gorge. Voici : nous ne mangeâmes de cette viande ce jour-là que parce que quelqu’un d’autre était venu faire la seule chose qu’il y avait à faire à cet instant précis. Tu avais faibli et manqué de courage. Elégante lâcheté ! Que disais-tu déjà ? Celui qui n’aime pas les animaux n’a pas de cœur et doit compléter sa foi en Allah. Allah a donné, Allah a repris. Béni soit le nom d’Allah.
Second mystère que je désirais percer : comment faisais-tu pour discuter (qu’est-ce que tu étais prolixe !) le matin après le petit déjeuner de l’islam en faisant l’exégèse de certains passages, revenant sur le sabab nouzoul, parlant de Figh ou de Sira et enchaîner le soir pendant et juste après le diner sur Mahmoud Kati, Sainte-Beuve, le Romantisme, les Parnassiens, Corneille, Fanon, Sophocle, Descartes, Al Hajaj, Ibn Sina, Theucidide ou Epicure ? Comment pouvais-tu discuter avec autant de simplicité et d’ouverture d’esprit, sans aucune censure ni tabou avec tes enfants comme s’il s’agissait de tes camarades de classe (nous avons gardé ensemble moutons et vaches mais cela suffit-il comme explication ?) pour n’interrompre le débat que pour aller diriger la prière dans une moquée de la Jedida ? Quel était ton secret pour attirer tous ces jeunes qui discutent et rigolent avec toi comme dans une cour de récréation ? Allah a donné, Allah a repris. Béni soit le nom d’Allah.
La dernière fois que je t’ai vu, il y a deux ans, nous avons beaucoup échangé au sujet de la Sourate Luqman. « Ô mon enfant, accomplis la Salat, commande le convenable, interdis le blâmable et endure ce qui t’arrive avec patience. Telle est la résolution à prendre dans toute circonstance » (Coran 31 :17). Tu prêchais et vivais la simplicité et l’humilité mais à un point ! (en même temps si tu n’exécrais pas au plus haut point le matériel, nous n’aurions jamais profité de ces jolis boubous, caftans, montres et parfums que tu renvoyais au fond de l’armoire et qui faisaient notre bonheur). Luqman enseignant à son fils : « Et ne détourne pas ton visage des hommes et ne foule pas la terre avec arrogance : car Allah n’aime pas le présomptueux plein de gloriole. Sois modeste dans ta démarche et baisse ta voix, car la plus détestée des voix c’est bien la voix des ânes » (Coran 31 : 18, 19).
Le voisin est sacré au point que fut posée la question de son droit à l’héritage. Recherche son pardon ne serait-ce que par l’odeur de ta cuisine : t’es-tu renseigné pour savoir s’il a de quoi diner ? L’objet sur lequel on trébuche (un caillou, une branche, une boite de conserve vide…) doit être ramassé et mis hors d’état de nuire. C’est une différence de taille entre l’humain et l’animal. Ne jamais, jamais, jamais porter la main sur une femme. Jamais. « Mon père ne battait pas les femmes, je ne le fais pas et je vous demande de ne pas le faire. » L’ami ! Toutes ces discussions me manqueront certainement. Après ça, on ne porte plus le même regard sur la vie.
A quoi as-tu pensé en dernier ? A tes élèves de l’école coranique ? Au séminaire de formation des imams que tu préparais dans la ferveur ? Aux travaux de réhabilitation de la mosquée ? A ta rencontre avec ton Seigneur (qu’Il soit satisfait de toi)?
« Nul ne sait ce qu’il acquerra demain et nul ne sait dans quelle terre il mourra » (Coran 31 :34). Tu es parti au moment où on s’y attendait le moins, après avoir accomplis ta prière. On ne s’y attendait pas parce qu’à même pas soixante-dix ans on pensait pouvoir profiter encore de toi quelques années d’autant que nous ne te connaissions pas de maladie grave. Mais la dessus nous n’avions aucune garantie ni promesse d’Allah. « Ô âme apaisée ! Retourne vers ton Seigneur, satisfaite, agréée ; entre donc parmi Mes serviteurs, et entre dans Mon Paradis » (Coran 90 :27, 28, 29, 30). Allah a donné, Allah a repris. Béni soit le nom d’Allah.
Pour ne pas ennuyer le lecteur, je n’ai parlé que de l’ami que tu as surtout été avant tout pour nous. Quant au père, il me faudra un éditeur.
Abdoulaye Diagana

dimanche 9 août 2009

Puisqu’il faut enfin se mettre au travail !


Puisqu’il faut sauver ce qui reste des institutions et que la rue n’arbitrera de toutes les façons pas le second tour, puisque les chances de voir le nouveau président de la république accéder à la demande de l’opposition sont proches de zéro (et c’est dommage), puisque tant d’éléments se déchainent et se liguent contre le volontarisme (réel ou supposé) de notre élite politique, la carte la plus probable reste celle de « la politique de ses moyens » qui confine à ce « réalisme » qui, en d’autres circonstances, ouvre la porte à tous les possibles et à tous les écarts. A moins de proclamer comme il y a quarante ans sous les barricades « soyons réalistes, demandons l’impossible ! », l’heure devra être au travail. Quelle que soit l’amertume de ceux qui ont pensé que le vainqueur de l’élection n’est pas celui qui était attendu ou encore que les conditions de ladite élection n’étaient pas idéales, il y a une réalité dont il faut s’accommoder et au plus vite : il y a bien une vie (politique) en dehors de la Présidence de la République (et de la rue publique). Quand Demba Sadio, Doubale Less et les grands lutteurs qui ont fait le bonheur des férus de ce noble sport se préparaient au combat, c’était toute une mécanique qui se mettait en branle. Traditionnalistes, griots, marabouts, féticheurs, musiciens, chanteurs, aficionados…tous étaient de la partie pour que la fête soit belle. Ne descendaient dans le dingiral (bera en soninké : arène) que les champions. Au nom de cette organisation du travail et de la nécessaire répartition des taches, tout le monde doit être au poste pour enfin qu’on s’attaque aux immenses travaux en souffrance.
L’opposition peut se renforcer et jouer ce rôle de vigie alertant les citoyens sur les implications des politiques initiées par la majorité. Elle doit tirer les enseignements de ses échecs (somme toute relatifs) et se demander si le jeu démocratique doit se limiter à la participation aux élections. L’encadrement des militants, l’instruction civique et politique en vue de faire comprendre le sens du vote et le rôle du citoyen dans la cité, l’implication de l’électeur dans le jeu politique en lui donnant comme contrepartie le pouvoir de contrôler l’action publique (on peut commencer par le local à travers les municipalités par exemple) et en rendant systématique le compte-rendu de mandat, l’écoute des populations et la prise en compte de leurs craintes, de leurs interrogations, de leurs doutes et aspirations…ce sont-là autant de pistes de réflexion pour se prémunir de certains travers et déconvenues (achats de conscience, nomadisme…) ou tout au moins, en limiter les méfaits.
La majorité doit donner acte de ce que l’opposition a reconnu (plus exactement « a pris acte »), sur le plan juridique, les résultats proclamés par le Conseil Constitutionnel. Mais la majorité doit aussi intégrer le fait que cette même opposition tient pour entière la crise politique que l’élection présidentielle était supposée définitivement résorber. En conséquence, le reconnu « juridiquement » vainqueur (plus prosaïquement, le Président de la République) doit clore la phase de la campagne et gouverner dans l’apaisement, c’est-à-dire loin de l’état d’esprit qui a animé le processus de conquête du pouvoir. A moins de vouloir ramener le pays à une situation caractérisée par le monolithisme politique et la chasse aux sorcières de l’opposition, la majorité doit éviter de faire payer leur choix à ses adversaires politiques en les livrant à la vindicte et en se barricadant derrière l’ostracisme et la stigmatisation.
Que « ceux qui ne savent pas faire autre chose qu’écrire et penser» -nul n’est parfait- (avec leurs limites et leurs modestes moyens), enrichissent le débat en s’inspirant de l’agriculteur qui a les pieds dans la boue tout en scrutant l’horizon pour en déchiffrer les moindres signaux. Parce qu’avant de réclamer la démocratie et l’ETAT moderne (westphalien), il nous faut aussi nous entendre sur le contenu que nous leur donnons. Faire l’économie du débat sur ces fondamentaux ouvre la voie aux malentendus.
La Société Civile (par la défense des opinions des plus vulnérables), les opérateurs économiques (en ne faisant pas du profit le point d’où tout doit partir et où tout doit revenir) tous en se faisant citoyens s’acquittant de nos devoirs tout en ne réclamant que ce qui nous est dû, les agents au service de l’Etat en se mettant au service de tous et non de leurs seuls ambitions et intérêts, les forces de défense et de sécurité en se consacrant (enfin) à la mission qui est la leur et en abandonnant la politique aux politiques au moment où notre pays inaugure les attentats-kamikazes (l’horreur a-t-elle élu domicile chez nous ?) nous avons tous un rôle primordial à jouer afin que la chose publique soit réhabilitée et que la communauté de destin nous conduise à donner toutes ses chances à ce projet que nous nourrissons pour notre Mauritanie : un pays qui protège tous ses fils et qui subvient aux besoins de chacun dans la mesure du possible sans discrimination aucune et qui inspire le respect sur la scène internationale.

Abdoulaye DIAGANA
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dimanche 2 août 2009

Élection présidentielle, la rue n’arbitrera pas le deuxième tour.


Note : Aux esprits simples, aux simples d’esprits avides de vérités simples : vous n’êtes pas obligés de chercher en vain à décrypter des textes d’analyse politique. Vous pouvez aller faire autre chose si vous saviez ! Cette plume est celle d’un homme libre, qui n’est ni soumis aux chapelles ni prompt à céder à l’embrigadement. Si manger à tous les râteliers m’intéressait, je serais devenu obèse depuis très longtemps.

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Le FNDD et le RFD (et selon toute vraisemblance, le candidat Ely Ould Mohamed Vall) vont donc poursuivre leur alliance pour faire la lumière sur le scrutin du 18 juillet 2009 dont le déroulement souffre d’un fort soupçon de fraude. S’ils avaient fait le choix inverse, ainsi que nous l’écrivions hier, ils n’auraient pas perdu la face. Maintenant qu’ils se disent prêts à accepter les résultats à la condition qu’une enquête indépendante dissipe les doutes, nul ne peut raisonnablement leur en tenir rigueur. Au justiciable qui réclame justice on ne peut opposer l’accusation de l’extrémisme en même temps qu’on se montre indulgent avec l’auteur présumé du délit. Cette opposition-là n’a pas choisi la facilité. Elle adopte cette posture au moment même où l’essentiel des partenaires de la Mauritanie se sont empressés de féliciter le déclaré vainqueur dès le résultat proclamé par « les sages » du Conseil Constitutionnel. Elle sait qu’elle joue gros : il lui faut mobiliser l’opinion nationale pour un combat décisif dont l’issue et la longueur seront fonction du rapport des forces en présence. Pas gagné. Le fer a refroidi.

Pour le candidat Mohamed Ould Abdel Aziz qui a enfourché sa rossinante pour lutter contre la gabegie et la prévarication (pour les esprits malins qui ne l’ont pas compris quand j’utilisais l’expression « chevalier blanc », je n’ai rien contre la satire et le second degré) il y a là une belle occasion de joindre le geste à la parole : il se doit, lui le premier, au nom de ce combat dont il se veut le champion (encore une fois c’est lui qui le prétend, mais là ce n’est plus de l’analyse, ça devient une explication de texte), exiger que soit levée toute suspicion sur les conditions de son élection. Parce que voler une élection n’est pas moins grave que voler le budget d’un projet ou d’un service, nous avons besoin de savoir s’il a lui-même franchi les étapes sans malversation…électorale. Il lui sera très difficile d’être crédible quand il n’a pu se montrer rigoureux et juste en refusant de s’appliquer ce qu’il veut appliquer à autrui. Pour un mauvais départ c’en est un. Mais entre nous, vu le calme de la « rue », il est très peu probable qu’il accède à cette demande.

Quant à la Mauritanie, elle retient son souffle et pense sans doute à ce qu’elle a pu gagner en troquant une élection saluée par tous il y a juste deux ans pour une largement contestée par les plus représentatives des forces d’opposition. Pour mettre tout le monde d’accord et éviter à un pays exsangue les affres de la contestation et de l’instabilité politiques, qu’on ouvre donc cette enquête pour que tout le monde puisse passer sereinement à autre chose. Il n’y a rien de telles que la rumeur et la suspicion pour jeter le discrédit sur nos institutions qu’il faut préserver et renforcer. Après tout, à quoi s’expose le pays en accédant à la demande des plaignants ? A pas grand-chose en vérité. Première hypothèse, les accusations ne sont pas étayées par des preuves formelles et irréfutables. Le déclaré vainqueur gagne en légitimité et les déclarés vaincus le félicitent comme ils semblent y être disposés et tout le monde le juge à l’œuvre et à l’ouvrage. Deuxième hypothèse, les accusations étaient fondées. Peut-on imaginer l’invalidation du scrutin et l’organisation de nouvelles élections ? Ou aura-t-on tout au plus un Gouvernement d’Union Nationale comme au Kenya ou au Zimbabwe? Au regard de l’importance de l’enjeu, il est plus que nécessaire de dissiper cet épais brouillard en accédant à la demande des plaignants, d’autant qu’en face on dit ne rien à se reprocher. Faut-il rappeler que les raisons invoquées, entre autres, pour justifier le coup d’Etat du 6 août étaient que le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi faisait obstruction et refusait l’ouverture d’une enquête sur le financement de la fondation de son épouse ? Et les accusateurs refuseraient l’ouverture d’une enquête sur un scrutin majeur ? Quand on vous dit qu’il y a une ironie dont seule l’histoire détient le secret !

Salut

Abdoulaye DIAGANA

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mardi 28 juillet 2009

Edito: Sauver ce qui reste de la crédibilité des institutions

Le Conseil Constitutionnel a donc validé le scrutin du 18 juillet 2009 dont les résultats donnent vainqueur le candidat Mohamed Ould Abdel Aziz. L’opposition qui a manifesté depuis le 6 août pour défendre le respect de la Constitution n’a plus d’autre alternative que de sauver ce qui reste de crédible dans nos institutions malmenées par 11 mois de retournements spectaculaires. Pour les leaders de l’opposition, ce n’est pas perdre la face que de préserver ce qui est plus important que tout le reste. Cette reconnaissance ne fera que renforcer leur posture de rempart contre les dérives anticonstitutionnelles. Plus que jamais, l’opposition joue sa crédibilité. Qu’elle rejette les résultats de cette élection et elle foule au sol les institutions qu’elle prétendait défendre naguère en même temps qu’elle met l’hypothèque sur ses chances de participer à d’éventuelles échéances électorales organisées par un président dont elle conteste la légitimité. C’est un pari extrêmement risqué, d’autant que la configuration n’est plus celle de l’après coup d’Etat. Les partenaires étrangers, y compris les plus irréductibles comme les USA, semblent se faire à l’idée de coopérer avec le nouvel élu. L’opposition ne pourra plus compter dès lors que sur les forces intérieures. Justement au plan national, les populations pourraient bien ne pas répondre à l’appel à la résistance au moment où presque rien ne fonctionne dans ce pays depuis le putsch du 6 août 2008. La lassitude, l’apathie et le désir de passer à autre chose font que cette élection, en dépit des soupçons qui pèsent sur les conditions de son déroulement, agissent sur les populations comme le frais ombrage de l’arbre touffu sur le voyageur fatigué : pose-toi là et repose-toi ! Et il n’y aura pas de quoi casser trois pattes à un canard.
S’il y en a qui doivent se sentir mal à l’aise ce sont nos « sages » qui, le 24 juin dernier déclaraient anticonstitutionnel le décret du président par intérim portant convocation du collège électoral pour le 18 juillet avant de valider quelques jours plus tard un autre décret signé dans les mêmes termes. Il est vrai qu’entre temps un chef d’Etat étranger est venu s’entretenir avec les « sages » du conseil constitutionnel et on se doute bien pourquoi.
Autre source de malaise : deux ans après avoir proclamé les résultats d’une élection présidentielle dans un consensus absolu et un climat apaisé, ils s’apprêtent à investir un président dont l’élection est contestée par trois de ses principaux concurrents et ce, sans lever la suspicion qui règne sur ladite élection.
Mauvais arrangement ou bon procès ?
Mohamed Ould Abdel Aziz sera président, souhaitons, jusqu’à la fin de son mandat, sans que lui arrive ce qu’il fit à son prédécesseur. La communauté nationale attend maintenant qu’il s’attaque aux chantiers qu’il a ouverts et qu’il réalise les importantes promesses qu’il a faites. Les moindres de ses faits et gestes seront minutieusement scrutés, lui le chevalier blanc qui a fait de la lutte contre la pauvreté et la gabegie un slogan de campagne. Que l’opposition joue son rôle en allant à l’assaut de tous les leviers lui permettant d’avoir l’œil sur la façon dont le pays sera gouverné. Qu’elle fasse le bilan et réajuste au besoin sa stratégie. Que tous préparent une nouvelle génération d’acteurs politiques avec de nouvelles façons de faire la politique.
Bonne chance à la Mauritanie !


Abdoulaye DIAGANA


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mardi 30 juin 2009

Réouverture des listes électorales: y a-t-il le feu à l'arrière-train?


Bonsoir,

Le décret qui a été validé par le conseil constitutionnel appelle à voter l'ENSEMBLE DU CORPS ÉLECTORAL et la réouverture des listes électorales concerne ce même ENSEMBLE. Il est inconcevable que certains citoyens puissent être concernés par cette décision à l'exclusion des autres. Le DROIT DE VOTE est pour tous les mauritaniens en âge de voter et jouissant de leurs droits civiques. Les autorités consulaires au service des citoyens mauritaniens établis à l'étranger se doivent de faire en sorte que leurs protégés puissent exercer dans les meilleurs conditions leurs droits consacrés par la Constitution qui nous rassemble et que nous essayons de réhabiliter. Pour finir les inscriptions ne sont ouvertes que jusqu'à jeudi. Pourquoi tant de précipitation? L'essentiel réside-t-il donc dans l'organisation d'une élection présidentielle quel qu'en soit le prix et quelle que soient les conditions? Vite fait bien fait et bon débarras: jeter l'apprenti nageur au milieu du fleuve et lui demander d'échapper aux tourbillons, aux tumultes, aux caïmans... En attendant d'obtenir le prolongement de l'ouverture des listes électorales (au moins jusqu'au début de la semaine prochaine pour que les mauritaniens établis dans les coins reculés à l'intérieur du pays comme à l'étranger dans les villes de province), il faut donc mobiliser au maximum par tous les moyens à notre portée. Envoyez ce message à tous vos contacts par mail, texto, téléphone, skype, msn, pigeon voyageur, porteur, nuage de fumée...

Bien à tous

samedi 27 juin 2009

Juste une illusion


C'est fait: le Président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi vient de signer l'acte par lequel il renonçait volontairement au mandat que lui avaient librement confié les mauritaniens et qui courait en principe jusqu'en 2012. Par ce geste, le Président élu débloque une situation qui avait plongé le pays dans l'immobilisme avec la promesse de lendemains incertains (ils le sont peut-être toujours du reste). La vie politique va se poursuivre donc sans lui. Le jour viendra certainement où les comptes se feront sans passions et avec discernement. Avons-nous raté quelque chose? Sommes-nous bien partis?
Avec toute la bonne volonté du monde il sera très difficile de dire que le pays et ses institutions sortent renforcés de cette épreuve.
D'abord, la classe politique s'est montrée incapable de nouer le dialogue et de parvenir à dépasser les contradictions inhérentes à l'exercice du pouvoir et à la gestion des affaires communes.
Ensuite, des organisations et pays étrangers ont été obligés de se pencher sur le sort de notre pays en l'auscultant jusqu'aux tripes: Qu'est que le président WADE (recordman de la manipulation de la Constitution, une quinzaine de fois depuis qu'il est arrivé au pouvoir par la voie des urnes) a-t-il bien pu demander aux sages du Conseil Constitutionnel moins de 48heures après leur décision rendant anticonstitutionnel le décret signé de Ba Mbaré, président du Sénat et président de la République par intérim selon le calendrier initial des militaires? De tripatouiller la Constitution et d'avaler la couleuvre pendant que les sages du Niger, pays présentant le même profil que le nôtre, bataillent fort pour défendre la leur?
Enfin, le plus important: malgré le poignant discours du président démissionnaire appelant les mauritaniens à soutenir celui qu'ils choisiront à l'issue de l'élection du 18 juillet prochain, il sera désormais extrêmement difficile d'amener le mauritanien à croire en la vertu d'une démocratie régissant l'organisation des pouvoirs et garantissant l'accession et la transmission du pouvoir par la voie pacifique, transparente, libre et concertée. Il y a seulement deux ans nous avons tous communié et dansé sur la dépouille de l'ennemi appelé coup d'État. Il nous avait été assuré que désormais plus aucune prise du pouvoir ne pourra se faire en dehors des mécanismes prévus par la constitution, elle-même verrouillée de telle sorte qu'il n'était pas possible d'aller au-delà des deux mandats prévus. Alors, quand on vient nous resservir la même soupe, il y a de quoi provoquer la grimace. Les électeurs iront peut-être à ces élections mais le cœur y sera-t-il comme en 2007?
Salut

Abdoulaye DIAGANA
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vendredi 26 juin 2009

Un artiste venu de nulle part.


S’il faut faire le compte des cœurs dévastés par la cruelle nouvelle de la disparition du roi de la pop c’est surement en centaines de millions qu’il faudra commencer. Ce sont tous ces anonymes transportés par les mélodies de « Ben », « Heal the world », « Wanna be startin’ somethin », « Beat it » ou enfin de « Black or white » (lequel choisir en vérité ?). Mickael JACKSON aura eu l’unique privilège, en 50 ans, d’être celui qui donne le la, l’étalon qui indique le chemin, la référence, l’exemple. On a beau dire, on a beau faire les plus irréductibles ennemis du chien sont obligés de reconnaître qu’il court vite et qu’il a les dents blanches : il y a Mickael Jackson et les autres. Réussissez un ouvrage exceptionnel et on dira que c’est un « Triller », devenez artiste intégral, global, exceptionnel chanteur, danseur inimitable doublé d’un monstre de la scène et on dira que vous êtes un Mickael JACKSON. Ce qui est en deuil chez de nombreuses personnes aujourd’hui à travers la planète c’est l’enfant qui sommeille en eux et qui a été bercé de chansons d’une rare générosité. C’est l’adulte qui, le temps d’un album, d’un clip, a oublié la rigueur du quotidien.
Ce jour, même le dévot dira : « Gloire à Toi, Seigneur que je suis venu adorer dans ma retraite ! Pour créer un être qui, malgré toutes ses imperfections, survole tous ses pairs par son prodigieux talent, il faut un Être Parfait et Vous l’êtes sans aucun doute ! »

Chapeau bas l’artiste et merci pour l’œuvre à nulle autre pareille. Merci de nous avoir bercé l’enfance.

Un inconsolable fan

lundi 27 avril 2009

QUESTION DE MESSAOUD OUL BOULKHEIR AU PRESIDENT DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Bonjour,

J'ai trouvé très succulent ce message adressé au Conseil Constitutionnel par Mr Messaoud Ould Boulkheir, Président de l'Assemblée Nationale de La République Islamique de Mauritanie. Je suis très impatient d'en lire la réponse.

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République Islamique de Mauritanie
Honneur - Fraternité• Justice

Assemblée Nationale


Nouakchott, le 23 avril 2009

Le Président

à,

Monsieur le Président du Conseil Constitutionnel
de la République islamique de Mauritanie à NOUAKCHOTT

Objet: demande d'un avis constitutionnel

Monsieur le Président,

Le 6 Août 2008, des Officiers Généraux conduits par le Général Mohamed O. Abdel Aziz se sont emparé du pouvoir par la force et ont déclaré avoir mis fin au pouvoir du Président de la République, démocratiquement élu 25 mars 2007 et investi le 19avril 2007, après avoir prêté serment devant votre auguste Conseil.

Au vu de ces événements, j'ai l'honneur de vous demander de bien vouloir répondre à la question suivante:

Un tel coup d'Etat est-il un acte valide au regard de la Constitution du 20
juillet 1991, révisée le 25 juin 2006 et est-il susceptible de modifier en toute légalité ladite Constitution?

Veuillez, agréer, Monsieur le Président, l’assurance de mes sentiments respectueux.

Messaoud Ould Boulkheir

dimanche 19 avril 2009

LANCEMENT DE LA RADIO KASSATAYA

Sur les conseils avisés de l'incontournable bebe ba, je vous poste ce nouveau message. Ce qui n'apparait pas dans le texte c'est la forte présence de visiteurs de ce blog et de son frère ainé canalh. Faites-en votre radio.
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Chers bloggers,

Après des mois d’hésitations et de labeurs nous avons décidé de lancer nos émissions sur kassataya.com. Les travaux sont en cours comme vous pouvez le vérifier. Nous avons jugé utile, après concertation, de mettre à profit l’anniversaire des deux de la remise du pouvoir à un Président civil élu au terme d’une élection saluée par tous pour ce lancement. Le site et la qualité des émissions s’étofferont avec le temps.
Les animateurs sont des bénévoles soucieux d’offrir un espace d’expression dans la diversité à tous les mauritaniens qui en expriment le besoin.
Kassataya.com se fixe donc pour objectif de (re) donner la parole à ceux qui ont besoin de se faire entendre et que tous nous avons intérêt à écouter. Généralement, en milieu traditionnel, les discussions ne se déroulaient pas dans des amphithéâtres ou dans des studios. Elles avaient lieu soit sous le baobab que la désertisation range dans le groupe des espèces en voie d’extinction, soit plus récemment, autour du thé. Le thé (ataya) est devenu une institution qui obéit à un rituel précis pour honorer un hôte ou juste pour accompagner les longues discussions dans le cercle familial ou dans les assemblées. Il est servi dans des verres (kass) que les convives se passent selon une codification qui varie selon les contrées et les communautés. D’où kassataya qui signifie verre de thé. Nous mettrons prochainement en ligne un document qui en expliquera la signification aux yeux de nombreuses communautés de l’ouest africain.

L’équipe.


Emission de lancement :

Mauritanie : deux ans après, la genèse d’une transition démocratique


Il y a deux ans jour pour jour le Conseil Constitutionnel de la République Islamique de Mauritanie installait dans ses fonctions le premier Président élu à l’issue d’élections démocratiques et pluralistes de l’histoire du pays. De nombreux chefs d’Etat étrangers étaient venus honorer de leur présence cette cérémonie qui saluait un nouveau printemps démocratique. Des témoins de premier plan et des acteurs viendront livrer leurs impressions sur une expérience saluée en son temps aussi bien par les observateurs internationaux que par les principaux candidats à l’élection présidentielle de mars 2007. Vous pouvez écouter l’émission ce dimanche 19 avril 09 à partir de 19h30 à Paris soit 17h30 en temps universel en direct sur www.kassataya.com et intervenir par un simple appel sur skype au pseudo suivant : kassataya.
Bonne écoute

samedi 18 avril 2009

BANQUE MONDIALE : L’AFRIQUE A L’HONNEUR


Monsieur Ousmane Salatou DIAGANA, mauritanien natif de Gattaga/Kaédi (450km au sud de la capitale Nouakchott) vient de recevoir des mains du président de la Banque Mondiale le prix du meilleur manager de l’institution. Cette distinction qui honore la Mauritanie et au-delà l’Afrique, vient prouver s’il en était besoin, que le continent regorge de talents. Nul n’étant prophète chez soi, Mr DIAGANA fait le bonheur de la Banque Mondiale où il poursuit une belle et heureuse carrière en attendant le jour où le privilège lui sera fait de servir son pays. Il est à souligner qu’il est de coutume dans de nombreux pays de faire appel à l’expérience des expatriés pour aider à surmonter les difficultés qui caractérisent les économies en développement.


Après son Baccalauréat en 1981 à Kaédi, Monsieur DIAGANA poursuit de brillantes études en Economie (Planification, Analyse économique et Développement) à l'Université de Dakar d'où il sort Major de Promotion. Il décroche au passage une bourse de 3ème cycle octroyée par l'Etat mauritanien pour s'inscrire à la prestigieuse ENAM de DAKAR (option Finance et Fiscalité). A son retour au pays, il servit comme Enseignant vacataire en Comptabilité nationale à l'Université de Nouakchott, collabora avec un bureau d'études local et exerça brièvement les fonctions d'Economiste à la mission résidente de la Banque Mondiale à Nouakchott. En 1992, Il est recruté par la Banque mondiale pour servir au Bénin où il est restera 6 ans. Monsieur DIAGANA faira reconnaître son travail et gravira plusieurs échelons au sein de cette Institution de Bretton Woods. Avide de science et de perfectionnement, il renforcera sa formation académique initiale par des séjours dans des universités prestigieuses comme Harvard à Boston aux USA et Institute of Development Studies à Sussex en Angleterre. Après le Bénin, M. DIAGANA montera à Washington au siège de l'Institution avant d’aller coller au terrain à Sana'a au Yemen et à Rabat au Maroc. En Octobre 2006, il est nommé Représentant Résident (Country Manager) au Niger, un pays confronté à d’énormes défis de développement. Au Niger, M. DIAGANA est responsable d'un portefeuille très large couvrant des programmes de développement humain, de développement rural, d' infrastructures, d'accès à l'eau potable, de macroéconomie , de finance et de développement du secteur privé. M. DIAGANA « est juste et équitable avec tout le monde » confie un de ses collaborateurs. « Sa première règle dans l’environnement professionnel est le respect » ajoute un autre. Son équipe est unanime à saluer le climat de sérénité que leur Manager a instauré à la Représentation de la Banque Mondiale. Ses collaborateurs disent avoir particulièrement apprécié le grand intérêt qu’il attache au perfectionnement de ses équipes notamment celles de la catégorie inférieure auxquelles M. DIAGANA a donné l’opportunité d’apprendre et de progresser. Décrit comme un dirigeant ouvert d’esprit, à l’abord facile et ayant le sens du collectif, il se distingue par sa très grande simplicité et sa disponibilité envers tous malgré un agenda très chargé.



Abdoulaye DIAGANA

France

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abdouldiagana@yahoo.fr

lundi 13 avril 2009

Le gros bobard diplomatique de Sarkozy

Chers lecteurs

En ces temps troubles que traverse notre pays, je vous propose cet article du journal français Libération qui revient sur les propos troublants du président français au sujet de la crise politique qui secoue la Mauritanie.

Bonne lecture.

DESINTOX

Le 27 mars, lors d'une conférence de presse, Nicolas Sarkozy s'est rendu coupable d'un étonnant mensonge d'Etat. Interrogé sur l'attitude de la France face au putsch qui a renversé le Président mauritanien en août, Sarkozy a prétendu avoir passé à ce dernier un coup de téléphone. Intox.

CÉDRIC MATHIOT

Nicolas Sarkozy à la télévision le 5 février dernier.

Nicolas Sarkozy à la télévision le 5 février dernier. (Ho New / Reuters)

Intox

C’est une affaire qui n’arrangera pas l’image déjà controversée de Nicolas Sarkozy en Afrique. Mercredi, la rubrique Désintox montrait comment Sarkozy a dérapé lors d’une conférence de presse au Niger, le 27 mars, en présentant le putsch en Mauritanie comme un quasi non-évènement. Le président français avait occulté aussi bien les condamnations internationales unanimes que les protestations locales, politiques ou populaires. Une vision très accommodante avec les putschistes qui avait suscité de vives réactions et dont certains observateurs suggéraient qu’elle a été soufflée par la bonne vieille Françafrique, décidée à frayer avec le nouveau pouvoir. Mais Sarkozy ne pourra seulement arguer la désinformation. Car lors de la même conférence de presse, pour réfuter toute ambiguïté de la position française, il a ajouté un énorme mensonge : «Quand le président démocratiquement désigné a été retenu, moi-même je l’ai appelé.» Sauf que…

Désintox

Nicolas Sarkozy a reçu un message, trois jours après ses déclarations à Niamey. Il émane d’un diplomate français, fin connaisseur de la Mauritanie, qui lui dit ceci : «Permettez-moi de vous rappeler que vous n’avez jamais parlé au téléphone avec le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, ni pendant qu’il était au secret au palais des Congrès de Nouakchott depuis le putsch du 6 août, ni ensuite dans son village de Lemden, où il est assigné à résidence.» Et le correspondant de Sarkozy de lui donner, à toutes fins utiles, le numéro de téléphone de son homologue mauritanien. Ce n’était pas une blague.

Contactée par Libération, la fille du président déchu, Amal Mint Cheikh Abdallahi, confirme ce qui ressemble à un étonnant bobard d’Etat : «Le président Sarkozy n’a jamais appelé le président Abdallahi. On est tombé des nues l’en écoutant dire le contraire lors de la conférence de presse.» La surprise a dû être d’autant plus saumâtre qu’Abdallahi, premier président démocratiquement élu du pays, en mars 2007, avait sollicité un tel échange. En vain. «Après le putsch, le Président a reçu l’ambassadeur de France en Mauritanie et lui a fait savoir qu’il souhaitait s’entretenir avec le chef de l’Etat français. Il ne s’est rien passé depuis», affirme la fille du dirigeant renversé. C’est elle qui a eu les seuls contacts directs avec Paris, via des conseillers de l’Elysée en charge des questions africaines. La junte n’a pas été moins bien traitée : ses dirigeants ont été reçus par le secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant.

Les services de l’Elysée, que nous avons joints pour avoir une explication sur ce coup de fil «fantôme», nous ont affirmé n’avoir pas d’«éléments d’information» à donner sur le sujet, ajoutant seulement : «La position de la France n’a pas changé, elle est toujours en faveur d’un retour à l’ordre constitutionnel en Mauritanie.»

Il faudra plus que ces déclarations de principe pour lever les ambiguïtés nées des mensonges d’un président qui nie les résistances au putsch et invente un coup de fil de soutien imaginaire au chef d’Etat déchu. Dans la même conférence de presse de Niamey, le 27 mars, Nicolas Sarkozy appelait de ses vœux la «transparence» comme base de la nouvelle relation entre la France et l’Afrique. Il reste à l’évidence du chemin à parcourir.

samedi 4 avril 2009

AHMED OULD DADDAH, COMME L'OISEAU DE MINERVE?

Dans la mythologie de la Grèce antique, un oiseau (une chouette !) perché sur l’épaule de la déesse Minerve (de la sagesse) prenait son envol seulement la nuit tombée. C’est ainsi que tout ce qui se rapporte à la sagesse est associé à l’oiseau de Minerve, arrivant sans précipitation, à point nommé, quand tout s’apaise. Au lendemain du désastreux coup d’Etat militaire qui mit brutalement fin à l’expérience démocratique en Mauritanie, de nombreuses voix se sont étonnées de la prise de position du chef de file de l’opposition que l’a junte à sitôt intronisé « soutien numéro » du coup d’Etat (ils diront plus exactement « rectification »). Les démocrates sincères ont alors estimé qu’il y avait-là au moins une faute grossière d’appréciation de la part d’un homme qui a si longtemps incarné la lutte intransigeante contre la dictature ou en tout pour la démocratie. L’article « l’heure d’Ahmed Ould Daddah » a souligné l’intérêt que trouveraient la Démocratie et Ahmed Ould Daddah à s’inspirer de l’exemple de Boris Eltsine volant au secours de son ennemi intime Michael Gorbatchev au lendemain du coup d’Etat dont celui-ci fut victime dans les dernières heures de l’empire soviétique. Ceux qui ont opté pour le système démocratique et le mode de dévolution pacifique du pouvoir par le seul suffrage universel direct peuvent se réjouir et se frotter les mains : le chef de file de l’opposition statutaire, leader historique de la lutte pour l’émergence de la démocratie, vient d’exaucer leurs vœux en rejoignant son camp naturel, celui de la lutte contre un coup d’Etat militaire perpétré contre un régime démocratiquement élu par le citoyen mauritanien.

Et vogue la rumeur
Grand perdant –mauvais perdant- le club des officiers putschistes qui voit s’envoler son plus grand atout, sa plus importante caution populaire, alimente la machine à rumeurs. L’industrie des potins connaissant une croissance et une vigueur à toute épreuve, les spéculations vont bon train quant aux réelles motivations du leader politique. Les ingénieurs en chef de la production industrielle de rumeurs soutiennent qu’il serait mû par la seule ambition de conquérir le pouvoir ! C’est la vocation première de tout parti politique et on ne peut le lui reprocher tant que les principes fondamentaux et les valeurs de la République sont observés. Ils ajoutent qu’il ne partagerait pas grand-chose avec le camp antiputsch ! Si : la reconquête de la démocratie et ça ne pèse pas peu. Ils terminent par l’argument selon lequel il trahirait dès qu’il en aurait l’occasion ! Nul n’es dupe ici : il ne s’agit pas d’un contrat à vie. Une fois le coup d’Etat mis en échec que chacun suive sa voie en tentant de gagner la confiance de l’électeur dans une saine compétition. Le fleuve déborde de son lit et les populations se désolent. Il le rejoint et elles se réjouissent en prenant leurs dispositions pour ne plus se faire surprendre par un nouveau débordement. Et c’est ainsi que coule l’eau sous les ponts.

Comme l’oiseau de Minerve
Ahmed Ould Daddah rejoint donc le camp des démocrates. L’oiseau de Minerve prend son vol tard. Il annonce le crépuscule non de ceux qui se dressent contre l’acte insensé mais bien de ceux qui ont pensé pouvoir impunément prendre des libertés avec les règles qui régissent la vie de la Société et qui, malgré plusieurs mois de brimades n’arrivent pas à imposer leur trahison (une première dans l’histoire d’une Mauritanie pourtant habituée aux coups d’Etats militaires). Il trouvera devant lui de vieux compagnons de route tels Messaoud Ould Boulkheir qui tient tête depuis les premières heures, Mohamed Ould Maouloud, Jemil Ould Mansour, Bâ Mamadou Alassane…et bien d’autres encore. Cette nouvelle prise de position arrive à point nommé : le pays est de plus en plus isolé et court à la catastrophe, le front antiputsch durcit le ton devant une junte désemparée qui accumule les fautes et s’isole de plus en plus. Le doute et la peur sont entrain de changer de camp. La violence aveugle dont fait montre la junte est un signe qui ne trompe pas. C’est parce que les choses sont entrain de lui échapper qu’elle emploie le seul langage qu’elle maîtrise vraiment : celui des canons face à une masse désarmée.

Abdoulaye DIAGANA
France
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abdouldiagana@yahoo.fr

lundi 30 mars 2009

Communiqué de Messaoud ould Boulkheir au sujet de la déclaration de Sarkozy a Niamey

Bonjour,
En réponse à la déclaration faite par Nicolas Sarkozy à Niamey au sujet de l'absence de mobilisation des Mauritaniens contre le coup d'État, le Président de l'Assemblée Nationale, Messaoud Ould Boulkheir a publié le communiqué ci-dessous.
Communiqué

J’ai été, ces derniers jours, assez surpris par des propos attribués au Président de la République française, Monsieur Nicolas Sarkozy, qui répondait à une question relative à la crise mauritanienne, lors de sa visite au Niger, le 27 Mars 2009, propos qui ont été vite repris, interprétés et brandis par la junte militaire comme une volte-face de la France.
N’eût été mon absolue certitude que la France d’aujourd’hui du président Sarkozy où se réaffirme sans cesse sa volonté d’éviter la réactivation des réseaux de la France d’hier, victime des tractations et des manipulations d’une certaine Françafrique, qui bien qu’obsolète et anachronique, ne désespère toujours pas de renaître de ses cendres, j’aurais été profondément dubitatif, à l’instar de nombreux de mes compatriotes, quant au sens à attribuer à de telles affirmations.
Ma surprise est d’autant plus fondée que la résistance (en question) au coup d’Etat a été immédiate, forte, et continue. Dès le premier jour, un Front national anti-putsch, regroupant les principales forces vives a vu le jour en Mauritanie ; cas unique en Afrique !
J’ai moi-même, dans une déclaration solennelle devant la presse nationale et internationale, exprimé mon rejet catégorique du coup d’Etat, en soulignant, loin de toute considération personnelle, le danger qu’il constitue pour la stabilité, le développement et l’image de la Mauritanie.
Depuis cette date, je n’ai cessé de parcourir le monde, de Paris à Johannesburg, passant par de nombreuses capitales africaines. J’ai été reçu par plusieurs Chefs d’Etat et par le Président de la Commission de l’Union Africaine, Monsieur Jean Ping et j’ai partout plaidé la résistance au coup d’Etat et la nécessité d’un retour à l’ordre constitutionnel en Mauritanie, sous peine de constituer un précédent dangereux pour le Continent tout entier et même pour le Monde.
A l’étape française, j’ai été reçu officiellement et avec les honneurs au Palais Bourbon par mon collègue le Président Bernard Accoyer, avec qui j’ai eu des entretiens fructueux. Nous avons été, ma délégation et moi, conviés à un déjeuner au Palais de l’Elysée, qui a été l’occasion d’un échange profitable avec de Hauts responsables de la Présidence française. J’ai eu, par ailleurs, l’occasion de m’adresser à la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée Nationale française devant laquelle j’ai fait un exposé détaillé sur la crise née du coup d’Etat du 6 août 2008.
Je dois signaler également que des délégations de parlementaires opposés au putsch ont sillonné, à leur tour, le monde, y compris la France et d’autres pays européens pour les sensibiliser sur la nécessité de faire échouer le coup d’état.
Il va sans dire que notre action à l’extérieur s’est accompagnée à l’intérieur d’une lutte courageuse et continue contre le coup d’Etat : des meetings, des manifestations durement réprimées, des sit-in et d’autres formes de protestation de masse, nonobstant la férocité de la machine répressive des putschistes (le Premier ministre et certains hauts responsables du Front anti-putsch sont toujours en détention).
Après toutes ces visites et ces actions, il nous avait semblé, qu’une fois pour toutes, la cause avait été entendue et bien entendue, notamment par la France qui est notre principal partenaire européen le plus à proximité et donc censé être le plus au courant de qui se passe chez nous.
Les ambiguïtés que les putschistes entretiennent aujourd’hui autour de la position française et l’exploitation qu’ils en font au plan intérieur, en invoquant tantôt des intérêts économiques (exploration pétrolière dans le Nord de la Mauritanie), tantôt des impératifs militaires (installation d’une base militaire française), rappellent malheureusement les méthodes désuètes d’un passé que tous les démocrates et tous les progressistes du monde doivent s’empresser d’oublier définitivement.
Pour toutes ces raisons, et compte tenu de la situation dangereuse que traverse mon pays, j’estime de mon devoir de demander à la France et à son Excellence le Président Sarkozy, de faire lever toute équivoque s’agissant de leur position à propos du coup d’Etat en République Islamique de Mauritanie.
Le coup d’Etat du Général Mohamed Ould Abdel Aziz qui méprise les intérêts bien compris de la Mauritanie et défie la Communauté Internationale , commence malheureusement à faire école dans le Continent. Il appelle de la part de la France un traitement particulier, qui découle de son rôle historique de Grande Nation démocratique et des idéaux censés fonder son action en Afrique et son rayonnement dans le Monde.
Les démocrates et les progressistes de Mauritanie, d’Afrique et du Monde attendent de la France et du Président Nicolas Sarkozy d’appuyer fermement les décisions pertinentes de l’Union Africaine, saluées et soutenues par la Communauté Internationale dans son ensemble.

Nouakchott, le 29 Mars 2009

Messaoud OULD BOULKHEIR

jeudi 26 mars 2009

LE GENERAL VA À LA PECHE AUX VOIX ET TOUS LES MOYENS SONT BONS.

Le général Mohamed Ould Abdel Aziz vient de se donner en spectacle à Kaédi d’une de ces façons dont lui seul a le secret. Au prétexte de solder la douloureuse question des violations massives des droits de l’homme perpétrées sous le règne du Colonel Ould Taya qui lui a tout donné en contrepartie de bons et loyaux services, le général putschiste se lance dans un discours grandiloquent ou la fausse émotion le dispute à l’hypocrisie à peine feinte.

Le général putschiste fait croire à son monde qu’il fait dans l’innovation alors qu’il enfonce une porte largement ouverte : il ne fait que répéter ce qu’a déjà fait dans des circonstances moins intéressées le Président élu Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi dans son discours du 29 juin 2007. Celui-ci, fort de la légitimité que lui confère le suffrage universel a reconnu la responsabilité de l’Etat, demandé pardon avant d’engager le processus de retour des réfugiés et d’indemnisation des victimes des atrocités commises par le régime que le général a protégé toute sa carrière avant de poignarder celui qui l’a enfanté. Le Général ould Abdel Aziz n’a lui aucune légitimité pour engager la responsabilité de l’Etat et demander pardon en son nom. Qui l’a investi de cette mission ? Qui lui en a donné mandat ?

A bien des égards, l’attitude du général est malsaine, malheureuse et maladroite.

Malsaine parce qu’elle se sert de la douleur des victimes pour assouvir des desseins électoralistes. La coïncidence avec son agenda politique est frappante. En langage très simple c’est du populisme de bas étage. Le témoignage vaut ce qu’il vaut. Il y a quelques années, un ancien ambassadeur -qui occupe de très hautes fonctions dans l’actuelle administration- me confiait qu’il avait demandé au dictateur Ould Taya lors d’une de ses visites pré électorales dans la vallée de demander pardon pour les événements de 1989-1991. Le colonel lui aurait répondu que s’il le faisait dans ces circonstances il donnerait l’impression de chercher à marchander les voix de la vallée. Vrai ou faux ; sincère ou non la raison avancée n’est pas sans fondement.

Malheureuse parce qu’elle accroît la défiance du citoyen vis-à-vis du politique et sa répugnance de tout acte posé par les gouvernants (encore qu’il est très difficile de ranger le général dans la catégorie des politiques même s’il se donne beaucoup de peine à le devenir depuis qu’il s’est créé un bataillon de députés à sa solde qu’il a su actionner quand il l’a voulu).

Maladroite parce qu’elle fait mine d’ignorer les complaintes de plus en plus fortes qui épinglent certaines personnalités très haut placées aux côtés du général à l’Assemblée Nationale et au HCE (suivez mon regard). Il eût été sincère qu’il eut ordonné à l’armée -qu’il contrôle depuis plusieurs années- de restituer les dépouilles des victimes avant de demander à ses proches mis en cause d’aller s’expliquer devant les tribunaux, lui qui se veut intraitable justicier.

Enfin, si on doutait de la sincérité de l’acte que tentait de poser le généralissime, il suffirait de lire le dernier paragraphe de son allocution pour lever l’équivoque : évoquer les problèmes d’électricité et d’assainissement posés par l’édile de la ville hôte après avoir joué sur l’émotion de populations vivant depuis vingt années dans le souvenir douloureux des massacres des années de braise s’apparente à s’y méprendre à une instrumentalisation sentimentale. C’est d’une affligeante maladresse. Du Shakespeare le talent en moins.

Abdoulaye DIAGANA

France

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samedi 21 mars 2009

KADHAFI L'AMI ENCOMBRANT ET L'ILLUSION DEMOCRATIQUE

Comme des coups de couteau qu’on appréhende, la médiation libyenne a visité notre pays. Elle y a surtout dirigé une prière que nul prophète n’a prescrite. L’essentiel était peut être là. Le reste a servi à amuser la galerie et à faire diversion. Le médiateur est un mégalomane fantasque avide de lumière et de fards. Il ne pouvait souffrir d’être moins vedette que les principaux protagonistes.

Kadhafi, nous le savons, a commencé sa carrière de prestidigitateur clinquant en renversant le roi Idriss Ier. Le bouillant Colonel a par la suite essayé plusieurs formules qui ont eu plus ou moins de fortune mais se sont toutes soldées par autant d’échecs. Agitateur enfilant les coups tordus sans succès, bras financier du terrorisme international puis des mouvements de rébellion, héraut théâtral du panarabisme… le voilà, lui le pourfendeur du pouvoir dynastique, qui se proclame sans rire Roi des rois traditionnels d’Afrique (ça ne s’invente pas) à l’issue du « forum des rois, des princes, des sultans et des cheikhs des tribus traditionnelles d’Afrique ». Ce qu'il n'a pu réussir avec son livre vert il se prend à rêver de l'obtenir grâce à l’inespérée tribune que lui offre la présidence de l'Union Africaine : semer le trouble, l’agitation et la zizanie où il pourra.

Sans doute dans le calcul de ses pairs africains, le secret espoir de le voir s’amender dans la perspective au moins de réussir une médiation et se donner une stature respectable a-t-il pesé dans la décision de confier la présidence même symbolique de l’Union à ce personnage inconstant et imprévisible. Le voilà qui enfourche sa rossinante pour parcourir les capitales d’Afrique dans le but de recueillir l’allégeance des rois, des princes, des sultans et des cheikhs traditionnels. Kadhafi ne voit dans la présidence de l’UA que l’occasion de laisser libre court à sa fantaisie à nulle autre pareille. Mais plus personne n’entend ce que dit Kadhafi parce que ce qu’il personnifie hurle trop fort.

Tous perdants.

Kadhafi et sa délégation sont passés et comme une nuée de sauterelles ils n’ont laissé que, ruines, désolation et champs dévastés derrière leur funeste cortège. Kadhafi n’est pas une lumière ni un flambeau mais un incendie qui consume tout sur son passage. Il est venu en terre mauritanienne débiter ses pitreries devant une assistance aux anges qui riait aux éclats et s’esclaffait à chaque injure proférée. Le maître lui a commandé de s’asseoir docilement à ses côtés et d’écouter religieusement sa leçon faite d’insultes, de railleries, de moqueries et d’humiliations. Des hommes naguère vantés pour leur courage et leur sens de l’honneur ont essuyé les avanies de l’insolent hôte et se sont sentis obligés de lui témoigner reconnaissance et satisfaction. Au premier rang figuraient, toute honte bue, les autorités militaires putschistes. Que ne ferait-on pour conserver un pouvoir usurpé ? S'il ne leur reste que Kadhafi pour héraut c'est vraiment que la terre commence à se dérober sous leurs pieds au point de rester assis, le sourire fiché aux lèvres, applaudissant un bouffon tragique et hystérique qui les humiliait en insultant leur histoire. Les voilà désormais dans le même camp qu’un saltimbanque ouvertement et résolument érigé en ennemi de la démocratie. Ils eussent pu, si la possibilité leur eut été faite, se choisir meilleure compagnie. En se choisissant un tel allié ils étalent les limites de leur latitude : ils sont coincés et très courts. Qui se ressemblent s’assemblent : désormais en définissant le camp des dictateurs mégalomanes, l’axe satanique et maléfique, on ne maquera d’associer la junte militaire mauritanienne à Kadhafi ! Triste destin !

Deuxième perdant l’UA qui a manifestement un gros souci: elle essaie d'imposer à ses membres un mode d'accession au pouvoir au travers d'élections libres et transparentes alors même qu’elle est présidée par un homme qui n'a jamais été élu, qui ne croit pas au modèle démocratique qui n'est à ses yeux qu'une excroissance honteuse venue de l'exécrable Occident. Comment quelqu'un qui se noie et qui ne sait pas nager peut il voler au secours d'un naufragé? C'est un hold up.

Troisième perdant le camp des démocrates. Pour avoir voulu jouer les gentlemen ils ont laissé le fou chantant semer la désolation avant de s’en aller triomphant. Plusieurs éléments alertaient pourtant dont l’accréditation d’un ambassadeur nommé par la junte militaire, les propos tenus à Tripoli à la délégation du FNDD et au Président Sidi Ould Cheikh Abdallahi au sujet du caractère irréversible du coup d’Etat… Ils ont joué le jeu et le maître du jeu s’est joué d’eux. C’est au moins une leçon à retenir.

Le retour de l’afro pessimisme.

Le roi des rois, des princes, des sultans et des cheikhs traditionnels d’Afrique a donc quitté la Mauritanie et son champs de ruines politiques pour dresser son chapiteau mental en Guinée Bissau puis au Niger pour propager la bonne parole : la démocratie est une ineptie pour l’Afrique. Nous devons recréer les anciens ensembles tribaux et les dynasties emportées dans le tréfonds de l’oubli, comme celle des fatimides et, si possible, en confier la direction au Roi des rois, des princes, des sultans et des cheikhs traditionnels d’une Afrique dans la plénitude de sa renaissance. Après la saillie et les railleries sur le non-sens que constitue la démocratie en Mauritanie, il embraye sur l’inconséquence que constitue la limitation des mandats, un dirigeant, un vrai, à défaut d’être empereur à vie des empereurs d’Afrique, devant rester au pouvoir quarante ans ou même soixante dix s’il le voulait (et le peuple donc !). Vous avez dit pathétique ?

Les années quatre-vingt-dix ont vu le continent souffrir de ce qu’il a été convenu d’appeler l’afro pessimisme, avec des images de guerre, de famine, de coups d’Etat militaires… relayées par les télévisions du monde entier. Depuis, à force d’indignations, les africains ont réussi à imposer plus ou moins une autre vision du continent. Que Stephen Smith se fasse littéralement agresser et traiter de negrophobe pour avoir dressé le tableau d’un continent en dérive dans Negrologie, pourquoi l’Afrique meurt ? est symptomatique de cette fièvre identitaire portée par des intellectuels à la sensibilité à fleur de peau dont les prises de position, au-delà de l’indignation légitime, cachaient mal une certaine gêne devant une actualité désespérément uniforme et têtue.

Les années 2000 promettaient autre chose, surtout depuis que l’Union Africaine, aidée de certains partenaires de la Communauté internationale, encadre le processus de conquête et d’exercice du pouvoir à travers une foisonnante et généreuse littérature sur la bonne gouvernance et d’autres vœux pieux du même ordre. Mais voilà que coup sur coup la Guinée Conakry, la Guinée Bissau et Madagascar emboîtent le pas à une Mauritanie naguère tout frais émoulu modèle de démocratie, pour remettre en cause tout ce que le monde croyait définitivement et irrémédiablement acquis. Pire, l’excentrique et carnavalesque Président de l’Union Africaine ne ménage aucun effort pour gagner à la cause de la croisade contre la démocratie les élèves présidents-à-vie, futurs rois des rois de la bêtise qui n’en demandaient pas tant. Si, comme le prêche l’illusionniste libyen, on en venait à entériner le fait accompli, c’en sera fini du rêve de démocratiser ce continent et d’y pacifier durablement l’activité politique. Comme quoi, confier la prévention et la lutte contre les incendies à un incurable pyromane n’était pas une idée lumineuse. L’enfer plutôt que la compagnie d’un maléfique ébouriffé !

Abdoulaye DIAGANA

France

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lundi 16 mars 2009

J’AI MAL A MA DEMOCRATIE

Nous avons mal à notre démocratie. Nous essayons de la vivre en jouissant des avantages qu’elle pourrait nous procurer sans nécessairement consentir les sacrifices qui s’y rattachent. La rose sans les épines en somme. Vous libérez un homme de ses chaînes, vous lui offrez les vastes étendues verdoyantes, l’océan et son large, le désert et son silence propice à la méditation et à la sagesse. Rien n’y fait : il vous revient toujours vous demandant les nouvelles consignes.
La démocratie est toujours et partout histoire de marchandages :
Je vote pour tel candidat et en contrepartie je satisfais une amie
Je vote pour tel autre et en contrepartie j’attends qu’il construise un pont.
Je vote pour tel candidat et en contrepartie il reconstruit l’Etat.
Je vote pour lui en contrepartie de l’argent qu’il m’a donné ou du logement qu’il va m’affecter, ou des impôts qu’il va baisser ou encore du poste qu’il va me donner, à moi ou à ma sœur ou à mon père. Il en est ainsi dans tous les pays qui peuvent prétendre jouir de la démocratie.
On entend souvent fredonner comme le refrain d’un disque rayé « le grand problème, la catastrophe » du soutien que certains militaires ont apporté à certains candidats dont Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Les mêmes disent que les militaires n’ont cependant pas obligé quelqu’un à voter pour Sidi Ould Cheikh Abdallahi (faut quand même pas abuser !), reconnaissant sans le réaliser, que les mauritaniens ont donc voté librement. Pourquoi peut-on accepter de voter pour faire plaisir au mari de ma tante et ne pas admettre que d’autres puissent voter pour les mêmes raisons ou des raisons voisines ?
Il y a un minimum syndical, un pré requis sans lequel on ne peut parler de démocratie : il faut que tous puissent voter sans contrainte, librement dans le secret de l’isoloir et qu’on ne sorte de l’urne que le résultat de ce que les électeurs ont librement exprimé. Le problème ici n’est pas de dire aux gens « ne vendez pas vos voix » mais bien de pouvoir leur dire « dans l’isoloir vous êtres libres de voter pour qui vous voulez ».
Dans toutes les démocraties du monde il y a des groupes qui essaient d’influencer le vote (lobbyistes, groupes de pression…) dans un sens ou dans l’autre en distribuant des cadeaux ou en faisant des promesses en tous genres. Il y a là un vrai problème de démocratie : les électeurs votent pour le plus offrant. Mais on ne peut en aucun cas dire que les groupes de pression ont confisqué la démocratie en contraignant un électeur de voter pour un candidat. Ils ont fait une offre pour répondre à une demande. Le marché est librement proposé et librement contracté. Naturellement, on arrive à un autre niveau où un travail plus profond et sur un plus long terme doit être engagé : qu’est-ce qui doit présider au choix d’un candidat ? Pourquoi voter pour celui-ci plutôt que pour celui-là ? Qu’est-ce que le sens d’un vote ?
Nous sommes dans des pays structurellement installés dans la spirale de l’instabilité et en proie à une lutte acharnée pour la survie. Dès lors comment être surpris qu’un électeur n’accorde que peu d’intérêt aux paroles lénifiantes d’un candidat promettant de renforcer les institutions de l’Etat, de recréer un appareil en déconfiture alors que le concurrent propose des sonnantes et trébuchantes qui auront une incidence immédiate et concrète là où l’Etat est perçu d’abord comme l’ennemi, l’entité impersonnelle et abstraite ? Moins que le corrupteur, le vrai problème c’est le corrompu. Lui seul peut exprimer son dégoût et son refus de marchander sa liberté. C’est ça le fond du problème ! Car une fois cet obstacle franchi on n’aura plus à se soucier de l’argent généreusement distribué ou des consignes de vote données par les chefs de tribus ou de confréries. Dans ce contexte vouloir accuser un candidat d’avoir distribué de l’argent ou d’avoir demandé à l’amie de sa nièce de voter pour lui c’est lui faire un procès en sorcellerie.
Abdoulaye DIAGANA
France

dimanche 22 février 2009

Lecture du communiqué du Groupe de Contact : qui instrumentalise la Mauritanie ?

Le camp de la junte au pouvoir aurait tort d’exulter juste parce que des sanctions ne sont pas tombées au sortir de la réunion du 20 février au siège de l'Organisation Internationale de la Francophonie. Je me dois de rappeler ce qui suit:
1: l'objet de la réunion du Groupe de Contact n'était absolument pas de statuer sur la prise de sanctions contre la junte au pouvoir. Donc seuls ceux qui ne savent pas de quoi ils parlent attendaient des sanctions ce jour.
2. Le Groupe de contac n'a pas vocation à imposer des sanctions aux organisations qui le composent et qui ont leurs propres mécanismes de prise de décision. L'Union Africaine a été mandatée pour conduire les consultations puis de proposer des solutions aux partenaires bi et multilatéraux. Je rappelle qu'à ce titre elle vient de transmettre au conseil de sécurité de l'ONU ses recommandations.
3. L'Union Européenne a décidé de mettre un terme aux consultations avec la junte pour insuffisance de résultats et s'apprête à adopter des sanctions contre les principaux animateurs du putsch militaire en Mauritanie (important: il n’a été question que de sanctions contre les seuls animateurs, civils et militaires, de la conspiration contre les institutions de la République). Le processus peut prendre quelques semaines.
4. Le Président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi a déjà accepté le principe de l’organisation de nouvelles élections une fois le putsch mis en échec et ce, pour préserver les intérêts du pays. L’essentiel se situe ici : faire échouer le putsch et tout le reste est envisageable.

Quant au communiqué du 20 février 09 proprement dit, il appelle les observations suivantes :
-Au paragraphe 2 de la déclaration il est mentionné que les participants «ont souligné l’importance du communiqué du Conseil de Paix et de Sécurité du 5 février 2009 décidant des sanctions individuelles et ciblées contre toutes les personnes, aussi bien civiles que militaires, dont les activités ont pour objet de maintenir le statu quo anticonstitutionnel en Mauritanie [et] ont réitéré la volonté de leurs organisations de prendre les mesures appropriées en fonction de leurs procédures respectives». Que faut-il entendre par là ? Comme rappelé plus haut le Groupe de contact n’a pas pour mission d’imposer des prises de sanctions aux parties qui le composent. Il aide à l’appréciation d’une situation au vu des éléments à sa disposition. Il appartient à chaque organisation d’apprécier l’opportunité d’adopter des mesures en fonction de ses mécanismes propres, c’est-à-dire en temps opportuns et selon la forme qu’elle juge appropriée. En ce sens, l’OIF a déjà décidé de suspendre la Mauritanie tout comme l’Union Africaine a arrêté le principe des sanctions individuelles contre la junte et ses soutiens civils et a notifié sa décision au conseil de sécurité des Nations Unies. L’Union Européenne a pour sa part décidé de clore les consultations avec les autorités putschistes et d’envisager la suite «dans le cadre de l’article 96 de l’accord de Cotonou et des étapes à venir » en application dudit accord. Or ce que prévoit l’article 96 des accords de Cotonou ce sont « Les "mesures appropriées" [qui] au sens du présent article, sont des mesures arrêtées en conformité avec le droit international et proportionnelles à la violation». Donc « la suite » qu’envisage l’Union Européenne après la clôture des consultations et le constat de l’absence de règlement de la profonde crise peut se deviner aisément pour toute personne qui a le nez entre la bouche et les yeux.
-Ce que dit également le communiqué du 20 février 2009 c’est que la proposition de sortie de crise du Président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi prévoit, comme les autres, « l’organisation d’élections anticipées sous certaines conditions ». Il y a donc unanimité (y compris donc de la part du président élu) au sujet de l’opportunité d’écourter le mandat actuel ; ce point n’est plus sujet de discussions. Quant aux conditions dont il est question il s’agit avant tout de la mise en échec du coup d’Etat, de la mise en place d’un gouvernement d’union nationale de transition chargé d’organiser lesdites élections dans des conditions de transparence et de neutralité non sujettes à contestation.
-Par ailleurs, si le communiqué se félicite de l’existence de plusieurs propositions favorisant un rapprochement et un dialogue inclusif, il rappelle la nécessité d’inclure celui-ci dans le cadre fixé par le communiqué du 21 novembre 2008 qui, faut-il le rappeler, donnait pour indispensable l’implication de Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi « en sa qualité de Président à la recherche d’une solution, la participation de toutes les parties prenantes et le plein respect de la Constitution ». On ne saurait être plus clair. Sans le rétablissement de Sidi Ould Cheikh Abdallahi dans sa qualité de Président, le coup d’Etat est entériné et il n’y a point de sortie de crise. Une fois qu’aura été fait échec au coup d’Etat sera alors envisageable « l’élection présidentielle [qui] doit être libre, juste et transparente, et organisée par des institutions crédibles, sous l’égide d’un gouvernement neutre. », toutes conditions que contient le plan de sortie de crise du président élu Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi. Autrement, comme le rappelle sans ambiguïté le communiqué du 20 févr.-09 «toute démarche unilatérale serait contreproductive et inacceptable ».
En un mot comme en mille, nous sommes devant le cas de figure suivant : un président démocratiquement élu accepte, au terme d’une crise politique profonde, de renoncer à son mandat pour organiser des élections anticipées. En face, un général qui s’est emparé du pouvoir cherche à organiser une élection qu’il contrôle de bout en bout et à laquelle il compte participer pour demeurer au pouvoir-, exactement comme son bienfaiteur le colonel Ould Taya- au mépris des appels incessants à la raison. Sept mois après le coup d’Etat militaire la junte n’arrive toujours pas à s’imposer aussi bien au peuple mauritanien qu’à la communauté internationale. Elle en est réduite à envoyer des émissaires qui n’éprouvent aucune gêne à faire le pied de grue pour quémander quelques minutes d’entretien pour se faire éconduire comme des malpropres par des vigiles ! Objectivement, si la question vaut encore d’être posée, qui s’accroche au pouvoir au point de prendre en otage tout un pays ? Qui est entrain de sombrer corps, biens et âme en tentant d’entraîner dans sa perte la Mauritanie et ses intérêts ?

DIAGANA Abdoulaye