Monsieur Mohamed Lemine ould Dadde, Commissaire aux droits de l’homme du gouvernement militaire
Vous avez inauguré une stèle dressée à la mémoire des touristes français victimes de la barbarie il y a juste un an. Dans un passé récent vous et moi avons partagé les mêmes rangs au nom d’un idéal de justice et de démocratie, comme quand nous nous mobilisions pour la libération de Chbih Ould Cheikh Malainine, ou pour dénoncer les conditions dans lesquelles le dictateur Ould Taya avait organisé le scrutin électoral de 2003 en emprisonnant le candidat Ould Haidallah à la veille du vote, ou enfin quand nous nous démenions pour épargner à Salah Ould Hanena, à Abdarahmane Ould Minih et à leurs compagnons d’infortune la peine de mort qui leur pendait au nez. Vous et moi avons également en commun ce Manifeste des Justes dont l’assermenté que vous êtes ne peut ignorer la substance. Les aléas de la vie (et du combat politique) vous ont conduit vers d’autres rivages qui s’accommodent plus facilement des exercices de contorsionniste comme l’allégeance à un ordre qui use de la contrainte pour se substituer illégalement à l’ordre constitutionnel. J’ignore où vous étiez lors de la commémoration du 48ème anniversaire de l’accession de la Mauritanie à l’indépendance ; j’étais moi du côté des veuves et des orphelins qui commémoraient un autre anniversaire, bien triste celui-là : la pendaison le 28 novembre 1990 à Inal de 28 militaires négromauritaniens. 28 pour le 28 novembre. J’aurais aimé lire l’expression de votre visage quand Diary TOUMBO, courageuse veuve du lieutenant Sall Abdoulaye racontait les conditions dans lesquelles sont époux a quitté pour la dernière fois le domicile conjugal. J’aurais aimé également croiser votre regard après le témoignage des orphelins et des autres veuves qui n’ont a aucun moment exprimé de la haine ni réclamé vengeance malgré la cruauté de l’acte. Vous comprendrez dès lors, cher compagnon d’un temps, que ma joie ne soit que partielle quand je vois l’empressement avec lequel vous commémorez à juste raison la disparition de touristes occidentaux alors que vous ne faites aucun cas de la disparition tragique et criminelle de vos propres concitoyens. Comment le Juste que vous êtes censé être peut-il admettre et laisser perdurer un tel dualisme ? Il ne doit pourtant pas être difficile de retrouver leurs dépouilles pour les inhumer enfin selon le rite musulman avant d’ériger un monument contre l’oubli et pour faciliter le travail de réconciliation sans lequel il serait illusoire de vouloir conduire les mauritaniens à regarder ensemble dans la même direction ni même de partager le même destin. Il vous suffirait de demander à certains de vos compagnons d’aujourd’hui ‘du côté du bureau de l’Assemblée Nationale par exemple) qui doivent certainement avoir même vaguement une idée de ce qui s’est passé et de l’endroit où leurs frères d’armes ont pu être enterrés à la sauvette. Cela ne légitimera pas pour autant votre gouvernement mais vous permettra de faire quelque chose d’utile et de consensuel avant que vos patrons ne retournent bientôt dans les casernes qu’ils n’auraient jamais du quitter.
Avec mes cordiales salutations.
Abdoulaye DIAGANA
www.souslatente.blogspot.com
abdouldiagana@yahoo.fr
jeudi 25 décembre 2008
Inscription à :
Articles (Atom)