Le leader du Rassemblement des Forces Démocratiques a fait une affirmation des plus inattendues sur les ondes d’une radio internationale. Le RFD est un parti démocratique parce qu’il est le seul à porter le mot « démocratique » dans son nom. Si c’est là un argument fourni par ses conseillers, Ahmed Ould Daddah devrait se faire beaucoup de soucis et penser déjà à mieux s’entourer.
D’abord parce que l’argument lui-même ne prouve rien. Les pays du bloc de l’Est ou Démocraties populaires connus, n’est-ce pas, pour leur grand respect de la liberté et de la Démocratie portaient presque tous dans leur dénomination le mot Démocratie. Cette particularité ne les a pourtant pas empêchés de produire et multiplier goulags et camps d’éducation et de réprimer vigoureusement toute tentative d’émancipation et d’éclosion d’un printemps des libertés.
Ensuite parce que l’affirmation est erronée. En effet le RFD partage ce rare privilège avec le PRDS de Ould Taya reconverti en PRDR avec toujours le mot « Démocratique » dont la présence peut avoir beaucoup de vertus, y compris, avec un peu de chance, celle de consacrer l’exercice libre, transparente et démocratique des affaires du parti et du pays.
Enfin, l’argument reste quand même ténu. Il est sorti comme si l’on était à ce point si conscient de l’incongruité de la position soutenue que l’on se sent obligé de marteler l’attachement à la démocratie pour mieux s’en convaincre et emporter l’adhésion des millions de sceptiques qui voyaient en Ahmed Ould Daddah le leader historique qui incarnait et personnifiait l’opposition à la dictature, donc objectivement le défenseur invétéré des libertés et de la Démocratie.
Ahmed Ould daddah aurait tort de penser qu’il pourrait tirer profit de l’affaiblissement de la Démocratie et de l’institution présidentielle. Ce qu’il vient d’entériner en accordant son soutien au putsch c’est bien le droit aux militaires de s’immiscer dans la gestion politique. L’Histoire retiendra que le leader historique de l’opposition démocratique a contribué à l’émergence d’une démocratie sous la tutelle de l’Armée. Ce n’est pas le terrain sur lequel on s’attendrait à rencontrer un démocrate républicain ; et le passé du leader du RFD ne suffira à atténuer la portée d’un tel choix. Qu’a-t-on retenu du maréchal Pétain ? Le régime de Vichy, l’homme qui a accepté de collaborer avec l’ennemi. Ce seul choix a réécrit ses états de service et réduit le vainqueur de Verdun à un vulgaire traître à la patrie.
Ahmed Ould Daddah est un leader politique et à ce titre on ne peut lui faire le reproche d’aller à la conquête du pouvoir. Mais cet objectif peut-il justifier la caution à un putsch militaire ? Ahmed ould Daddah a rappelé qu’il fixait principalement trois préalables à toute participation à un gouvernement sous tutelle militaire : (i) la fixation d’une date de retour à l’ordre constitutionnel dans une fourchette de 6 à 12 mois (ii) l’engagement des militaires à ne pas se présenter à l’élection et (iii) à ne soutenir aucun candidat. Ce faisant, il établit les priorités : ce sont là les trois points « extrêmement importants » à ses yeux dont dépendra son élection à la magistrature suprême. Pour quoi faire ensuite ? Gouverner avec la hantise de se faire déposer par les militaires si d’aventure ils n’étaient pas satisfaits de la gestion d’un Ahmed ould Daddah démocratiquement élu par le peuple souverain (conformément à la jurisprudence validée par…Ahmed ould Daddah lui-même) ?
dimanche 31 août 2008
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