mercredi 3 septembre 2008

ILS VONT NOUS AFFAMER !

Les mauvaises nouvelles se suivent en Mauritanie. Après l’U.A, les USA et l’UE les Nations Unies viennent de condamner vigoureusement le renversement du président démocratiquement élu de la Mauritanie et refusent de reconnaître tout autre gouvernement que celui désigné par Sidi Ould Cheikh Abdallahi et son premier ministre. Mais ce qui suscite les plus grandes inquiétudes c’est surtout la succession de mesures visant à réduire la rébellion d’une partie de l’Armée contre la démocratie mauritanienne : suspension de l’aide non humanitaire des USA, de la France, de l’UE et les menaces de sanctions du conseil de sécurité des nations, de durcissement de la position de la France et de l’UE. Cette batterie de mesures limite largement les putschistes dans leurs manœuvres. Ils peuvent jouer la montre et miser sur le temps pour adoucir la position des partenaires au développement. Mais c’est lier le sort de tout un peuple éprouvé par des conditions de vie insupportables à une très peu probable issue. Le pays peut vivre un temps sur ses maigres réserves mais bientôt la période de soudure pointera et nous devrons nous nourrir de… De quoi au juste ? Ce qui nous pend au nez, c’est une inflation exponentielle, la famine, le rationnement des produits de grande consommation, la pénurie, la dépréciation de la monnaie nationale…Il faut imaginer la ménagère mauritanienne tirer péniblement derrière elle une valise de billets pour aller acheter quelques grammes de thé dans les rares boutiques à en disposer encore. Le temps joue inexorablement contre ceux qui se sont assis sur le choix de tout un peuple. La question n’est pas de savoir s’ils finiront par capituler mais quand et après quels dégâts ? Il faut se demander si des hommes qui se disent patriotes et soucieux du bien-être de leur peuple (après tout pourquoi pas ? Mais on demande à croire) peuvent laisser celui-ci supporter d’inutiles souffrances. Le syndrome Irak, Zimbabwé et Zaïre frappe dangereusement à nos portes. Et comme toujours, les premières victimes de ce genre de situations ne seront pas nécessairement ceux qui en sont les responsables. Ils disposent d’assez de réserves pour être à l’abri de la pénurie… Mais combien de temps vont-ils tenir ? Quelques semaines ? Quelques mois tout au plus ? Le jeu en vaut-il vraiment la chandelle ? Nos chefs jouent avec le feu. Les efforts (déjà très en deçà de ce qu’il fallait) fournis depuis des décennies pour mettre en place un semblant d’économie fonctionnant avec les standards internationaux sont sur le point d’être réduits à néant. Les prêts, aides, subventions, dons en tous genres consentis par les partenaires au développement vont être redéployés et réaffectés et il faudra des trésors de patience, une force de persuasion à nulle autre pareille, des garanties qui iront désormais au-delà de la simple organisation d’élections libres et transparentes pour que la communauté internationale se laisse tenter par une nouvelle aventure avec un pays aussi instable. Les militaires et leurs soutiens civiles ont beau crier que la Mauritanie peut se débrouiller sans l’aide internationale ; ils savent bien qu’il n’en est rien et ne pensent pas un seul mot de ce qu’ils disent ou alors ce seraient de très grands naïfs doublés d’incompétents notoires qui n’ont rien compris au monde qui les entoure. Déjà avec cette aide nous ne parvenions pas à prévenir les menaces de famine et les difficultés de trésorerie et on nous fait croire qu’on ferait beaucoup mieux avec beaucoup moins !!! Ne sont-ils pas simplement entrain d’insulter l’intelligence de millions de mauritaniens ? Ce qui nous pend au nez c’est la déliquescence et la faillite de l’Etat et l’obligation de tout reprendre à zéro. Des années de retard à accuser sur le sinueux chemin du développement. Je me refuse à croire que tout ce mal soit imposé aux mauritaniens par patriotisme et par amour. Rarement inconséquence et irresponsabilité auront été poussées aussi loin.
Quant à ceux qui crient au scandale de l’ingérence, on se demanderait où ils étaient quand cette communauté internationale qu’ils chargent de tant de maux finançait le processus électoral en Mauritanie ou quand elle faisait de l’acharnement thérapeutique sur une patiente sous perfusion et en quasi mort clinique? S’il faut parler de souveraineté nationale il faut aller jusqu’au bout de la logique et se donner les moyens de sa politique. Des mauritaniens ont unilatéralement rompu le contrat qui les liait à la communauté internationale (et accessoirement au reste des mauritaniens) au terme duquel l’aide venait en contrepartie de l’observance des règles du jeu démocratique et de la bonne gouvernance. Ils ont violé le contrat en sachant plus ou moins (plutôt moins que plus) ce à quoi ils s’exposaient. Le peuple, lui, attend le sort qui frappera irrémédiablement : ils vont donc nous affamer et nous regardons faire. Jusqu’à mourir sans geindre.